Première différence marquée : les Français ont des réflexes d’emprunteurs – en privilégiant la relance de la consommation – quand les Allemands se montrent plus prêteur – en confortant les exportations.

Deux visions qui s’entrechoquent et exacerbent les différences en matière de finances publiques, d’échanges extérieurs et d’emplois… Et le Brexit place donc la France et l’Allemagne en position de piliers de l’Europe, ce qui n’est pas sans risques. Les autres Etats pourraient ainsi se voir exclus des processus de décisions, comme ce qui était le cas des les années 70 et 80. À une différence prête : l’UE ne comptait pas autant de pays. Les Etats d’Europe de l’Est entendent désormais avoir voix au chapitre.

Deuxième risque : la divergence croissante d’intérêts entre les 2 pays

Deuxième risque : la divergence croissante d’intérêts entre les 2 pays, qui rend de plus en plus difficile l’élaboration de projets communs. Sur le plan politique d’abord, l’Allemagne n’est plus celle des années 70. La réunification lui a donné le crédit qu’elle ne s’accordait pas au sortir de la Seconde Guerre Mondiale. Sa modestie dans les échanges internationaux lui a permis d’obtenir de conserver ses liens privilégiés avec les Etats-Unis et l’Union Européenne. Quelques concessions ont été nécessaires, comme la reconnaissance de la ligne OderNeisse, concernant les frontières avec la Pologne et la Russie notamment. L’Allemagne réunifiée s’est donc imposée comme première puissance économique en Europe, le tout, de manière totalement pacifique.

Victoire française, en revanche, celle de la monnaie unique, là où l’Allemagne ne voulait pas sacrifier sa monnaie et sa politique monétaire.

Helmut Kohl a, ainsi joué sur l’ambiguïté pendant des années, ce qui est aujourd’hui couronné de succès, car beaucoup estiment que l’€ fait la part belle aux intérêts allemands. Et loin d’affaiblir l’Allemagne, la mutualisation et la coordination que nécessite la monnaie unique n’a eu qu’un effet limité. L’Allemagne a même longtemps dicter sa loi monétaire aux autres pays, la France en tête. Au début des années 90, la Bundesbank a souvent augmenté ses taux afin d’éviter une série de dévaluations. Et même si au début des années 2000, l’Allemagne accusait une croissance en berne, une inflation en hausse et des résultats extérieurs faibles, les mesures prises en 2004 pour maîtrisé les coûts salariaux, lui a permis de renouer avec des excédents commerciaux et une croissance supérieure à la moyenne de la zone€.

Au contraire, la France a commencé à rencontrer un déficit commercial et un fort mouvement de désindustrialisation dès 2003. L’Allemagne profitait, elle, de l’apparition de classes moyennes dans les pays émergents pour exporter des voitures. Ces 20 dernières années, le poids de l’Industrie allemande est passée de 18 à 20% du PIB, là où il a diminué de 12 à 10% en France. Les entreprises françaises ont donc plus souvent eu recours à la délocalisation que leurs homologues allemandes.

Ainsi, en 2018, le PIB de l’Allemagne est 30% supérieurs à celui de la France et de 12% concernant le PIB par habitant, là où il était identique il y a 30 ans. Le taux de chômage, est fixé à 3,1% en Allemagne, contre 8,5 en France. Enfin, l’Allemagne respecte tous les critères imposés par Maastricht, là où la dette publique française a franchi les 100% du PIB en 2019. Seule l’arrivée à maturité de l’industrie des pays émergents – qui entraîne un choc économique important depuis 2 ans, en Allemagne – et le durcissement des normes environnementales opèrent un rapprochement entre les 2 pays.

Mais pour maintenir sa compétitivité, l’Allemagne défend un taux de change de l’€ élevé. Le pays parie sur une importation à bas coûts dans les pays émergents, et importe 2 fois plus que la France. Notre pays pourrait donc profiter d’un € fort pour réduire le coût de ses importations, mais nos dirigeants ont toujours préféré un € faible pour favoriser les exportations. Or, le vieillissement de l’Allemagne est plus avancé que celui de la France. La proportion de personnes de plus de 60 ans a grimpé à 29% outre-Rhin, et sera de 34% en 2029, contre 30% en France. Enfin, concernant l’endettement, les Allemands veillent à favoriser les affaires, et diversifient leurs bassins d’emplois, notamment par le fédéralisme qui est la règle, dans le système politique. Là où les gouvernements français sont plus interventionnistes. De quoi, là aussi, rendre complexes les politiques communes. La méfiance allemande demeure donc à l’égard de son voisin français. La rancœur issue des épisodes napoléoniens s’étant également transmises de générations en générations.