Le sommet qui réunissait Bruxelles et Pékin, lundi, a notamment abordé cette problématique de la souveraineté. Car l’UE ne souhaite plus être le pion militaire des Etats-Unis, ni rester apathique devant la croissance économique chinoise. Et si le mandat de Jean-Claude Junker était placé sous le signe de la « politique », celui d’Ursula von der Leyen sera « géopolitique ».

Mais cette souveraineté, et la défense des valeurs européennes, passe notamment par la reprise en main du numérique. Car de nombreux citoyens européens stockent leurs données auprès de fournisseurs de services en ligne américains, comme Amazon et Google. Or, « la souveraineté numérique constitue une part essentielle de l’indépendance », selon Eric Maurice, de la fondation Robert-Schuman, à Bruxelles. De plus, les services secrets Américains n’hésitent pas à accéder aux données des européens, à travers la Loi du « Cloud Act ».

Pour faire face, la Cour de Justice européenne a annulé l’accord dit « Privacy Shield », qui autorisait les transferts de données entre les entreprises européennes et américaines, sans pour autant donner la possibilité aux citoyens européens de s’y opposer. L’Europe a ainsi défendu ses valeurs et les droits de ses citoyens. Simplement, le directeur général de l’association allemande de l’Industrie de l’Internet, estime que la charrue a été placée avant les bœufs, du fait du manque d’alternative européenne, en ce qui concerne les fournisseurs d’accès. Seul le projet franco-allemand de GaiaX, pourrait fournir ces services de « cloud », mais simplement à partir de l’an prochain.

Il s’agira alors d’une plateforme, accessible en nombre limité pour les pays extérieurs à l’UE, pour trouver son fournisseur, en fonction de certains critères, comme le respect du règlement général sur la protection des données (RGPD). Pour Alexandre Rabe, de l’association allemande de l’Industrie de l’Internet, l’Europe et les entreprises américaines qui accepteront ces règles claires, auront tout à y gagner. Ces entreprises « s’y conformeront car le marché est attractif […] et les clients fidèles », selon lui. L’Allemagne va encore plus loin, avec son catalogue de sécurité, pour les fournisseurs de la 5G, puisque l’Europe pourrait mandater des géants chinois, comme Huawei, pour équiper le continent de cet internet très haut-débit, qui pourra permettre de nombreuses innovations.

Mais les Etats-Unis, vigoureux dans les sanctions contre Huawei, demandent à l’Europe d’en faire autant. Face à cette politique, Bruxelles laisse le libre choix à ses Etats. Et si la République Tchèque a suivi les Etats-Unis, l’Espagne a engagé Huawei. L’Allemagne préfère donc faire adhérer les entreprises qu’elle choisit, à ses normes. Autant de questions qui se sont donc retrouver sur la table des négociations entre Bruxelles et Pékin, lundi. Affaire à suivre…