Bonjour à tous!

Depuis déjà une semaine, nous les chrétiens catholiques, nous sommes entrés dans le temps de Pâques. Le mot lui-même mérite que l’on s’y arrête un peu. Pâque signifie le passage, comme celui de la mer rouge par les hébreux conduits par Moïse. Il désigne aussi l’agneau (pascal) que l’on mange pour commémorer cet événement. Avec un s pour désigner la résurrection du Christ alors que sans “s” pour désigner la pâque juive. Pour ceux qui veulent continuer à creuser la question pour savoir par exemple quand il y a à mettre un “P” majuscule et quand le “p” minuscule, le Petit Robert peut être d’un bon support.

Le temps de pâques est une période qui dure 50 jours, jusqu’à la Pentecôte, elle aussi calquée sur le temps qui s’écoule entre deux fêtes juives; la pâque juive donc et la fête de Chavouot qui, elle commémore la remise des tables de la Loi à Moïse. Dans le calendrier catholique, cette période de cinquante jours commence par une semaine très particulière. Souvent on n’en voit pas bien le caractère propre et quelle importance elle peut avoir. 

En fait, durant huit jours à compter du dimanche de Pâques, l’Eglise nous propose de célébrer chaque jour solennellement la Résurrection du Christ. Ce qui veut dire que concrètement, chaque jour de l’octave, les fidèles qui se réunissent à l’église quand cela est possible, célèbrent solennellement la Pâques du Christ. 

Dans le classement des fêtes chrétiennes par catégorie, la solennité est la plus importante. La solennité de l’octave s’exprime par le le chant de l’Hymne à la gloire de Dieu qui commence par les paroles suivantes : “Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre aux hommes…” puis est proclamée solennellement la résurrection. Durant l’octave chaque jour est célébrée la messe de Pâques avec les mêmes prières et le même faste. Loin de nous le faste de célébrations d’octave dès le IV siècle, mais le sens reste le même. 

Pourquoi une telle insistance sur la fête de la résurrection? On s’en doute, c’est pour signifier que la foi chrétienne s’inscrit d’abord dans le fait de la résurrection du Christ et donc la nôtre. Le caractère insolite d’une telle affirmation est fondée sur le fait historique. Mais pour y accéder on a besoin d’être accompagné par un acte de foi. La raison humaine, fondée sur l’observation empirique de la mort comme phénomène irréversible, semble devoir contester le caractère insolite de la résurrection. 

Par delà tout cela, ce qui importe ici, c’est de constater qu’avec la résurrection du Christ c’est une nouvelle humanité qui advient. Une création nouvelle, car renouvelée dans le sang de l’Agneau (Apocalypse 12,11). Durant toute la semaine de cette octave nous avons l’occasion d’approfondir le sens de ce que cela peut vouloir dire concrètement pour chacun. 

Prenons l’exemple de la pandémie en cours. La nouvelle création apparaît toujours à la suite de l’ancienne. En quoi la pandémie va-t-elle changer le monde et chacun personnellement? Ce n’est pas certain qu’elle provoque un renouvellement total, à l’image d’une nouvelle création, comme par exemple dans les cas relatés par les évangiles d’un lépreux, dont la peau une fois guérie deviendrait comme celle d’un bébé. 

Il ne semble pas que le changement attendu par beaucoup aura lieu de façon aussi massive que souhaité.Trop d’enjeux de toutes sortes, enjeux dont les particularités vont primer sur l’intérêt général, sans parler du bien commun. Trop de discordes que cela révèle et même engendre, et le front commun de lutte contre un ennemi commun est fragile. Fragiles sont aussi nos bonnes résolutions que nous faisons quand ça va mal. Une fois le danger passé, il nous semblerait bien légitime de revenir à la situation antérieure, surtout lorsque cela nous convient. 

Or, la foi chrétienne nous rappelle que le renouvellement se fait avec l’aide de la grâce de Dieu. La grâce est ce mystérieux coup de pouce presque insensible, en tout cas invisible. C’est une part d’ange qui nous alimente d’une nourriture dont souvent, nous les consommateurs, ne reconnaissons ni goût du ciel ni odeur de gloire à partager. 

Le renouvellement en profondeur participe à l’avènement de la création nouvelle. Les caractéristiques justement nouvelles en sont celles dont rêvent tous les humains. En quoi l’approche chrétienne est donc supposée être indispensable pour apporter quelque chose que l’on a pas encore et qui pourrait intéresser les autres? 

Ce qu’il y a de particulier, c’est le fait que la foi chrétienne est fondée sur une conviction intime; très profonde, à savoir que la vie est plus forte que la mort. Mais cela suppose une vertu d’espérance qui peut fluctuer au gré des événements et des humeurs, auxquels nos vies sont si souvent soumies. 

Cette espérance, la foi chrétienne la tire de la sève de la puissance d’amour qui s’exprime à travers le pardon et où la souffrance est convoquée comme témoin incontestable. Ceci est contenu dans ce que nous appelons la miséricorde de Dieu. Depuis, que le pape Jean-Paul II a instauré en l’an 2000, le dimanche de la fin de l’octave comme dimanche de la Miséricorde, cette fête met en lumière la réalité de la création nouvelle à laquelle l’on accède par le pardon qui rend possible les relations “amicales” avec Dieu et en communauté des croyants et dans la communauté humaine.   

Sur le fond de la pandémie en cours, la nouvelle création est une création, où tout est à prendre en compte: les misères comme les espérances, les audaces comme les timidités, les forces comme les faiblesses. Sans négliger aucun des dégâts collatéraux qui seront vraisemblablement plus grands que la pandémie elle-même. Sans négliger non plus aucun des effets secondaires bénéfiques qui en résulteraient.

Sans négliger l’impact direct des premiers, objectivement négatifs, les seconds sont plus importants pour tous les optimistes de la terre dont le chrétien fait partie, car, par la nature spirituelle de l’espérance qui est en lui, il est un optimiste naturel. 

Et le chrétien heureux de participer à sa façon à ce renouvellement sera un témoin actif, attentif à la participation de tous à cette nouvelle création dont il porte déjà des stigmates. 

Bonne semaine à tous et à dimanche prochain.