Le Président de la République l’a répété à 6 reprises lors de sa déclaration du 16 mars « la France est en guerre contre le coronavirus ». Cela implique donc un plan de communication, mais contrairement aux derniers conflits armés qu’a connu la France depuis 1870, ici personne ne s’affronte et l’ennemi est invisible.

Cette guerre n’impose donc pas une censure de l’information, mais au contraire, on assiste à un défilé d’experts sur les plateaux télés. Médecins, professeurs, chefs de service, infirmiers, aides-soignants ont été appelés à témoigner sur les nombreuses chaînes d’information. Un besoin d’information réclamé par les Français, à en croire les 94% de part d’audience qu’a eu droit l’allocation présidentielle du 13 avril, avec 36,7 millions de téléspectateurs derrière leur écran. De plus, chaque soir, le directeur général de la Santé – le Professeur Salomon – et le ministre de la Santé et des Solidarités – Olivier Véran – communiquent les dernières données du front, comme 2 Généraux du Commandement. Or, la concurrence des moyens et supports de communication et l’appétence de certains médias de masse pour les avis tranchés, peuvent créer une surenchère dangereuse et qui est susceptible de brouiller la communication.

Or, un petit cours d’Histoire s’impose sur la censure imposée à la presse en période de guerre, de 1870 à la fin de la Guerre d’Algérie en 1962. En 1870, la presse avait en effet contribué à la défaite de Sedan, en livrant les orientations stratégiques de Mac-Mahon, dans Le Temps, faisant modifier les plans de l’Etat-major prussien. Au lendemain de l’entrée dans la Première Guerre Mondiale de la France, le bureau de la presse du Ministère de la guerre a soumis les journaux à un régime de contrôle stricte. Les journalistes devant livrer leur travail à l’administration pour procéder aux modifications exigées. Le tout, sur l’autel de l’interdiction de toute publication dangereuse. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, le contrôle postal, télégraphique et téléphonique a été activé quelques jours avant la déclaration de guerre. Les journaux d’obédience communiste furent interdits, et une autorisation préalable à la réglementation de publication fût instaurée. Enfin, durant la guerre d’Algérie, les différents gouvernements s’appuyèrent sur l’état d’urgence pour réduire la liberté de la presse. Des saisies de journaux furent appliquées pour mener cette censure.

Or la transparence exigée pendant cette crise sanitaire est consécutive aux crises de la canicule de 2003, et du sang contaminé de la fin des années 80, durant lesquelles, les Gouvernement furent accusés, à tort, de ne pas donner le nombre réel de décès. Mais les nombreuses séries télévisées liées à la santé ont modifié notre rapport à la mort au sein des sociétés occidentales. De plus, la gestion de la communication de crise, au niveau sanitaire, est forcément différente. Les acteurs majeurs ne sont pas des militaires, soumis à une obligation de réserve. Ce qui implique, cependant, une complication pour les gouvernements en place…