Un livre raconte ces histoires des Français à Hong Kong depuis les origines de la colonie britannique jusqu’à nos jours.

(Article que vous pouvez retrouver sur le blog de Gérard Henri, « Entre montagnes et mers ».)

 

Saviez-vous que le premier artiste français venu à Hong Kong était en 1838 le peintre Auguste Borget, un ami de Balzac, dont on peut encore voir les œuvres dans les musées de Hong Kong et de Macao?

 

Saviez-vous que l’architecte français Hermitte remporta en 1861 le concours d’architecture du premier City Hall de Hong Kong? Qu’en 1894, le chercheur Yersin de l’institut Pasteur découvrit le bacille de la peste dans sa paillote de Kennedy Town? Que le révolutionnaire et espion français Bruno Crémet, envoyé par le Kominterm, rencontra en secret, déguisé en supporter de foot, le révolutionnaire vietnamien Hô Chi Minh dans un stade de Kowloon pour fonder le Parti communiste vietnamien ? Ou qu’en 1920 Charles Ricou inaugura la première liaison aérienne Macao-Hong Kong par un service d’hydravions qui amerrissaient sur la plage de Repulse Bay, au sud de l’île de Hong Kong?

 

Présences françaises est un gros ouvrage magnifiquement illustré qui raconte les grandes et petites histoires des Français à Hong Kong depuis les origines de la colonie britannique jusqu’à nos jours. Ce livre célébrait le 150e anniversaire de la création du consulat français à Hong Kong, mais il ne s’agit pas d’un ennuyeux livre commémoratif: il conte d’étonnantes aventures.

Cet ouvrage collectif est la somme de recherches entreprises durant des années à Hong Kong, en Asie et en France par une petite équipe d’auteurs sur les traces des Français ayant vécu ou transité par Hong Kong depuis la création de la colonie britannique.

 

Il couvre bien sûr les histoires diplomatiques et militaires, notamment celle de la marine de guerre française dans la région, des passages des vaisseaux français à Hong Kong, mais aussi la création des banques et entreprises françaises, des écoles missionnaires, comme Saint-Paul par les sœurs de Chartres, le collège Saint-Joseph ou le collège La Salle en 1930.

Il évoque aussi l’histoire des missions étrangères de Paris, qui construisirent le sanatorium de Béthanie à Pokfulam (aujourd’hui restauré, il abrite l’école de cinéma de Hong Kong), et dans le bâtiment de Nazareth (aujourd’hui sur le campus de Hong Kong University) une impressionnante imprimerie, la plus grande d’Asie, qui imprima pour la première fois certaines langues des minorités de la région et de Chine.

 

On y trouve aussi les œuvres de l’architecture française à Hong Kong, l’histoire d’institutions culturelles comme l’Alliance française ou le lycée français international, l’influence du cinéma français à Hong Kong, avec les films français qui ont été tournés sur le territoire et des anecdotes avec de grands acteurs comme Belmondo ou les Charlots, et même Serge Gainsbourg et Depardieu, venus tourner dans la ville.

Le plus fascinant est le côté très vivant et humain de cet ouvrage qui comporte un large éventail de destins personnels de tous genres, entrepreneurs, banquiers, écrivains ou même espions, escrocs ou prostituées. Un morceau d’histoire française certainement, mais surtout d’histoire hongkongaise, car on y croise de nombreux portraits de Hongkongais qui ont entretenu dans le domaine commercial ou culturel d’étroites relations avec ces Français.

 

Il contient aussi de nombreux témoignages de grands voyageurs, de journalistes ou d’écrivains qui au cours de ces cent cinquante ans sont passés par Hong Kong.

Paul Claudel ne rejoindra jamais son poste de consul général à Hong Kong, préférant rester en Chine où il vit une histoire d’amour, mais il placera le poème “Hong Kong” en tête de son recueil sur la Chine, Connaissance de l’est. Victor Segalen, arrivant de nuit le 25 mai 1909, envoie une lettre magnifique à sa femme : “Hong Kong est une chose splendide. Première vision de Chine, car ces monts hautains, aux lignes élégantes et nobles, drapés de brousse verte, voilée parfois à mi-seins de collines de l’ombre de nuage, cela, c’est de la terre chinoise, malgré la possession anglaise…”



Paul Morand, lui, est moins enthousiaste quand il fait escale à Hong Kong en 1925, car il trouve un Hong Kong au port bloqué par les grèves et les conflits sociaux. “Hong Kong se rouille”, écrit-il dans son récit de voyage Rien que la terre, publié chez Gallimard. Les journalistes et grands reporters Marc Chadourne et Andrée Viollis font dans les années 1930 un portrait remarquable et détaillé de la société hongkongaise.

Quant à Jean Cocteau, il y arrive à 8 heures du soir en tout hâte le 9 mai 1936 , tentant de refaire l’exploit de Phileas Fogg du Tour du Monde en 80 jours de Jules Vernes. A ses yeux, Hong Kong n’est qu’un gigantesque opéra. “La magnificence sordide et la pompe théâtrale de Hong Kong l’emportent sur le spectacle des villes chinoises de la péninsule. Hong Kong, c’est le dragon. Il ondule, se cabre, plonge et s’enroule de tous ces boulevards de rues adjacentes, de bazars qui sont des ruelles, d’impasses borgnes et d’escaliers à pic…”

Présences françaises va ainsi d’époque en époque, du XIXe siècle à nos jours, traversant les deux guerres mondiales, la révolution moderniste des années 1960, les années 1980, qui voient l’essor de la communauté française de Hong Kong, de ses entreprises et de sa programmation culturelle avec le French Cinepanorama, le French May où le magazine Paroles, apportant leur contribution à l’histoire de Hong Kong.

 

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A lire : Hong Kong, présences françaises du XIXe siècle à nos jours

(English version: Hong Kong French Connections), 

de François Drémaux, Alain Le Pichon, Paul Clerc Renaud, Gérard Henry, Christian Ramage (disponible à la librairie Parenthèses, 14 Wellington Street, Hong Kong).

Photo chapelle de Béthanie @Virgile Simon Bertrand

 

Blog de Gérard Henri

Antigone sur les toits de Hong Kong