On ne compte plus le nombre de spectacles reportés, d’artistes déprimés, de troupes empêchées qui ont attendu la fin du confinement de printemps pour relancer leurs activités. Un répit de courte durée puisque nombre d’artistes tremblent désormais en cette fin d’année 2021 face aux variants qui pourraient annuler nombre d’événements culturels à venir. Année de douleur pour la culture ou année en apesanteur où chacun retient son souffle et profite du plaisir de lire, d’aller au cinéma ou au théâtre en espérant que l’épidémie se tasse enfin. 

Une sélection 2021 populaire et exigeante

Avec la rédaction de Français.press nous avons décidé de vous offrir un panorama du meilleur de la culture 2021, en optant pour des artistes qui vivent ou travaillent à l’étranger ou qui y sont célébrés par les institutions culturelles françaises ou étrangères. Des artistes très populaires ou dont la réputation est plus confidentielle et que nous vous offrons de découvrir.

Un coup de chapeau à notre réseau culturel français dans le monde

Cette sélection se veut également un hommage à toutes les formes de culture et à notre réseau culturel français qui, à travers les Instituts français ou les Alliances, promeut la diversité des artistes et créations hexagonales ou francophones dans le monde entier. Les véritables héros et héroïnes de la culture ce sont nos diplomates et coopérants, ce sont les personnels de ces structures qui ont résisté à la crise et à qui nous tirons notre chapeau. Car ils font vivre la culture au quotidien, tout simplement. 

Un français de Los Angeles à l’honneur : Omar Sy dans Lupin

Il vit à Los Angeles depuis 2012. Depuis le succès incroyable de “Intouchables”, ce film à succès qui le fit passer de la catégorie de trublion de la télé à acteur de cinéma à la réputation internationale. En cette année 2021 il s’est imposé auprès des plus jeunes grâce à Lupin, la mise à jour télévisuelle de la série littéraire créee par Maurice Leblanc. Tous les parents qui ont vu leurs enfants réclamer l’achat d’un des livres policiers mettant en scène le célèbre gentleman cambrioleur lui en sont reconnaissants. Tout comme la commune d’Etretat qui abrite la scène du final de la deuxième saison et qui voit les touristes français et étrangers affluer grâce à l’acteur qui fournit un Lupin très convaincant. La série s’est imposée dans le top 10 des séries les plus vues dans le monde, preuve qu’un héros typiquement français peut aussi toucher un public plus universel. Omar Sy a réuni dans l’hexagone plus de 76 millions de spectateurs pour la première saison diffusée en janvier. La deuxième a réuni un public aussi large et on attend la troisième saison bientôt on l’espère. L’occasion de savoir enfin qui a tué le père d’Assane Diop et provoqué son désir de vengeance ? Le suspense reste entier. 

Un grand Goncourt francophone : “La plus secrète mémoire des hommes” de Mohamed Mbougar Sarr

L’écrivain sénégalais de 31 ans qui a fait ses études en France à l’EHESS méritait pleinement de figurer dans ce classement. On peut parfois gloser sur les raisons commerciales qui justifient l’attribution d’un prix. Mais “La plus secrète mémoire des hommes” mérite pleinement l’hommage rendu par le jury de chez Drouant. C’est son 4ème roman que l’académie Goncourt célèbre ainsi et c’est le premier écrivain d’Afrique subsaharienne qui reçoit cet honneur. 

L’écriture tout d’abord retient l’attention par son mélange de préciosité dans le choix du vocabulaire et de passages franchement rabelaisiens et drolatiques. Un mariage heureux d’érudition et d’esprit leste. L’intrigue se situe dans le milieu de la diaspora littéraire africaine, le narrateur étant fasciné par “Le labyrinthe de l’inhumain” un livre fascinant de T.C. Elimane, un auteur africain assimilé à un véritable “Rimbaud nègre” et dont tout le monde a perdu trace. C’est donc à une quête littéraire que le narrateur se livre pendant plus de 400 pages avec des rebondissements savoureux. On ne s’ennuie jamais, on jubile devant les expressions choisies par l’auteur et devant les rencontres qui émaillent le récit et le fait rebondir. Un jeune auteur francophone à suivre plus que jamais !

Coup de projecteur sur le festival du film français de Hong Kong

53 films à l’affiche pour fêter 50 ans de cinéma français à Hong-Kong en octobre ! Voilà la belle surprise faire par l’équipe de l’Alliance française locale au public francophone du Port Parfumé. Si le festival existe depuis 1972 sous cette forme, c’est depuis 1953 que date la toute première édition avec, à l’époque, une projection des Vacances de Monsieur Hulot montrant le visage d’un cinéma français fantaisiste et amusant. Pour l’édition 2021 qui a réussi à se tenir en salle malgré les fortes contraintes sanitaires, deux films étaient en particulier à l’honneur en ouverture : Titane, la dernière palme d’or controversée de Julia Ducournau, et Aline de Valérie Lemercier, charmant biopic consacré à la vie de Céline Dion.

Si le festival a été l’occasion de revoir des grands classiques du cinéma populaire, comme la Boum et les allures mutines de Sophie Marceau adolescente, le mariage entre films élitistes ou relevant de la catégorie Arts et essais et d’opus destinés à un plus large public aura permis d’offrir une rétrospective intelligente de ce qui peut faire la force de frappe française en matière de cinéma : une recherche esthétique doublée de modes de narrations originaux, une quête de divertissement alliée à une ambition plus réflexive. Que vive le cinéma français en temps de crise

Une biennale contre vents et marées

La 17e Exposition internationale d’Art et d’Architecture de Venise, annulée l’an dernier à cause de la crise sanitaire, a pu se tenir cette année pour le plus grand bonheur des amateurs d’art contemporain. Le pavillon français interrogeait la notion de vivre-ensemble, sujet capital en ces temps de repli sur soi et de doute collectif. Le pavillon avait été réalisé par l’architecte Christophe Hutin pour y présenter “Les communautés à l’œuvre” à travers plusieurs films réalisés sur place dans un Township sud-africain, un immeuble sud-américain, notamment. Les captations vidéos sont toutes disponibles en ligne pour mettre en valeur l’échange entre  des artistes et des habitants qui indiquent comment l’art et la création leurs permettent de tisser du lien social malgré la pauvreté locale ou la période épidémique qui distend les relations humaines. Les vidéos qui ont été tournées sur quatre continents disent l’universalité des défis propres aux communautés filmées (rénover l’habitat, animer les espaces, cultiver même en milieu urbain, s’approvisionner) et la singularité des sujets (cette jeune femme qui dit son bonheur d’avoir pris l’avion pour la première fois mais aussi le retour aux réalités du township après la fin du projet). 

L’art au service de l’humain et comme trait d’union, voilà un message que nous voulions célébrer à travers notre rétrospective culturelle.  

“La jeune femme et la mer”, une Française au Japon

La saison croisée France-Japon n’a pas eu lieu cette année. L’événement qui devait se tenir dans les deux pays a été annulé à cause de l’épidémie. On mesure là les dégâts et les frustrations que peuvent générer la Covid qui a frappé de plein fouet un secteur culturel lourdement éprouvé dans le monde par les annulations et les reports.

Mais comme un symbole d’une culture de résistance nous avons voulu mettre en lumière le travail de Catherine Meurisse en matière de BD. “La jeune femme et la mer” est le fruit de plusieurs séjours au Japon de l’artiste qui a trouvé dans la culture locale et en particulier dans l’observation de la nature une source de renouvellement de son art. L’artiste  a pu résider plusieurs mois à la Villa Kujoyama, une résidence d’artistes gérée par la France et située à Kyoto, ville considérée comme la capitale culturelle du pays. La dessinatrice possédait en arrivant au Japon une œuvre déjà solide, avait travaillé pour Charlie Hebdo et avait à son actif plusieurs dizaines d’albums marqués par un style fait de références culturelles et d’humour. “La jeune femme et la mer” est une véritable ode à la nature qui met en scène un double de l’artiste dans ses premiers pas au Japon face à une culture très codifiée. Catherine Meurisse a connu la consécration récente d’être introduite à l’académie des beaux-arts en tant que première femme dessinatrice de BD. Une BD raffinée et drôle à découvrir ou offrir pour les fêtes. 

Un essai coup de poing : David Di Nota et la contre-enquête sur l’assassinat de Samuel Paty

Pour finir cette rétrospective nous souhaitions évoquer un Français de Londres installé dans la capitale britannique depuis trois ans. Ce romancier et traducteur est à l’image de nombre de nos compatriotes vivant dans la mégapole londonienne : un esprit cosmopolite et polyglotte.

L’auteur a récemment commis un ouvrage consacré au professeur assassiné par un fanatique islamiste voilà déjà un an. Cette contre-enquête apporte un point de vue engagé et montre les étapes qui ont conduit au drame. 

Avec cet essai intitulé “J’ai exécuté un chien de l’enfer”, nous avons voulu mettre en lumière les Français qui dans le monde s’engagent au service de la liberté d’expression en prenant la plume ou en tournant caméra au poing.

Car la culture permet de divertir les femmes et les hommes mais donne aussi matière à stimuler leur réflexion.